Article soumis par Gérard Leduc en janvier 2011
Depuis la découverte des sources sulfureuses par Nathan Banfil en 1828, le site de Potton Springs situé dans le canton de Potton ne cesse de fasciner. En 1998, la Fondation Poorna Jnana Yoga s’y établit et commence à y aménager un centre de santé et de ressourcement spirituel. Il y a plus de dix ans, j’entreprenais des recherches non seulement sur l’historique du site, mais aussi sur son archéologie. De tous les gens qui ont fréquenté Potton Springs depuis 1828, y en a-t-il qui ont observé des alignements de pierre orientés vers les couchers du soleil aux solstices d’hiver et d’été? C’est possible, mais on n’en sait rien.
L’automne dernier, j’y ai découvert un site archéoastronomique, c’est-à-dire un site archéologique lié à l’astronomie de l’endroit, où les structures d’origine humaine permettent de suivre le déplacement des astres. Je viens de confirmer cela par photos lors du dernier solstice d’hiver du 21 décembre au 6 janvier.
Une pente raide nous amène à la source sulfureuse située à flanc de montagne, au pied du mont Peeve. Au sommet des dernières marches de pierre taillée, une large dalle, façonnée de main d’homme en forme de pointeur, lance un signal; elle mesure 1,4 m de longueur par 60 cm de largeur. À partir de ce repère, en regardant vers le sud en direction des monts Sutton, on aperçoit plus bas, dans la forêt, une grosse pierre mesurant environ 1,40 m d’envergure. Ce bloc et le pointeur près de la source forment un alignement qui permet de prédire la position exacte du soleil couchant sur l’horizon au solstice d’hiver. La photo prise à ce moment précis le démontre.
Cette position se mesure par l’azimut sur une boussole, soit le nombre de degrés par rapport au nord (0 degré) sur une circonférence imaginaire de 360 degrés; la lecture est corrigée pour la déclinaison magnétique. Or, cet azimut varie selon l’altitude de l’horizon. Au niveau de la mer, soit un horizon d’altitude zéro, c’est l’azimut théorique. Ici, en montagne, le soleil disparaît avant d’avoir atteint l’altitude zéro. C’est l’azimut réel du coucher du soleil qui est visible de la source à 232º; l’azimut théorique serait de 237º.
Cet alignement à Potton Springs est-il une coïncidence de la nature? Non, pour deux raisons! D’abord, le pointeur de pierre est de facture humaine; il manifeste donc l’intention de la part des auteurs du site d’observer l’horizon à un moment précis.
Deuxièmement, en plus d’indiquer la position du soleil couchant, les anciens ont aménagé un deuxième alignement qui indique l’azimut théorique du soleil couchant au solstice d’hiver. En effet, au pied des marches de pierre qui conduisent à la source, un autre gros bloc de pierre fut placé de façon à donner, à partir du pointeur, le degré d’azimut du coucher du soleil sur un horizon d’altitude zéro. L’azimut mesuré est 239º soit deux degrés de plus que le chiffre prévu de 237º dans les tables d’astronomie. Je reconnais qu’un appareil de mesure d’orientation plus précis que ma boussole minimiserait l’erreur.
Épilogue
Dans les limites d’erreur de l’observation sur le terrain en hiver, j’ai acquis la conviction que les alignements décrits ici confirment bien que des hommes, férus d’astronomie, ont aménagé ce site il y a très longtemps. Ils l’ont fait non seulement pour observer le soleil au temps du solstice d’hiver, mais aussi pour laisser un témoignage concret de leurs connaissances sur le cosmos. Dans ce cas précis, elles démontrent la différence entre les azimuts réel et théorique du coucher du soleil. D’autres données géodésiques pouvaient aussi être obtenues sur cet observatoire d’astronomie.
Les connaissances sur le cosmos remontent très loin dans l’histoire de l’humanité. Par exemple, en France, l’archéologue Chantal Jègues-Wolkiewiev a observé, dans des grottes occupées il y a plus de 35 000 ans, des alignements archéoastronomiques ciblés sur le soleil, la lune et les constellations. Ces découvertes sont illustrées dans un film fascinant, Lascaux : le ciel des premiers hommes.
Le site de Potton Springs justifie des recherches plus poussées, car les abords de la source sulfureuse étaient certainement, dans des temps très éloignés, un haut lieu d’astronomie et de spiritualité. Ce n’est pas le premier site archéoastronomique découvert dans Potton. Qui a érigé ces sites? Vraisemblablement, des constructeurs de pierre d’une culture avancée qui ont laissé ici d’innombrables vestiges, dont certains remontent à 1800 ans avant aujourd’hui.
Article soumis par Gérard Leduc en janvier 2011